lundi 31 août 2009

Léonard SARLUIS. Voyage au pays de la quatrième dimension


Illustrations de Léonard Sarluis pour
Voyage au pays de la quatrième dimension
de Gaston de Pawlowski.
Eugène Fasquelle, 1923, 32,5 x 25 cm, 180 pp.







Monogramme de Gaston de Pawlowski pour la justification de tirage
































J'ai déjà eu l'occasion de citer Léonard Sarluis dans un billet sur Fanny Zaessinger à propos d'une scène du roman d'Alfred Jarry, Les Jours et les Nuits, se déroulant dans l'atelier du peintre (Fanny Zaessinger : Ernest La Jeunesse, Alfred Jarry, et les autres.)

Pour en savoir plus sur Gaston de Pawlowski et son roman voir l'excellent article Cher Gaston sur le blog Au Temps de l'oeil Cacodylate.

Vient de paraître : Gaston de Pawlowski : Inventions nouvelles et dernières nouveautés. Préface d'Eric Walbecq. Bordeaux, Finitude, 2009, 12 x 17 cm, 128 pages, 13,50 euros.

Voir aussi : Gaston de Pawlowski : Paysages animés. Préface d’Éric Walbecq et Jacques Damade. La Bibliothèque, 12 x 17 cm, 144 pages. - Gaston de Pawlowski : Voyage au pays de la quatrième dimension. Édition présentée par Éric Walbecq suivie de la correspondance inédite de l'éditeur et des lecteurs adressée à l'auteur. L’Autruche guatémaltèque editore, 308 pp. Diffusion : Paréiasaure éditions.

vendredi 28 août 2009

La Caserne d'Albert LANTOINE par René GHIL


Avec Marcel Batilliat, Abel Pelletier, Charles-Louis Philippe, Albert Lantoine fut l'un des auteurs-amis chroniqués par René Ghil dans La Critique.

La Caserne



L'heure est heureuse pour M. Albert Lantoine, à publier ce volume qui, lorsque va retomber à sa place de nécessité néfaste, une institution sans gloire, apporte en drame lent et misère à misère vécu, un impersonnel réquisitoire de seuls faits : l'émiettement dans le marasme et l'imbécillité démontrée, de trois années de la vie d'hommes à vingt ans, et particulièrement de la vie d'un homme arrivant à tel néant de lui-même, qu'instinctivement il la dénoue dans la mort... Des « patriotes », de ceux-là pour qui l'amour de la patrie est un métier et un tambour et aussi une excuse au mensonge et au crime, sans doute vont reprocher à l'auteur d'avoir habilement choisi cette heure heureuse : il sied donc de dire que ce livre est écrit depuis plus de quatre ans (1) et d'autant mieux nous lui saurons gré de nous le donner, après le délicieux poème Elisçuah et les Mascouillat (2).
En quoi donc se singularise pour un éloge nouveau, ce livre, roman militaire après quelques autres dont le souvenir ne peut nous quitter, et qui sont, entre les meilleurs, Sous-offs , Sous le sabre, le Cavalier Miserey (3). Jusqu'ici l'on nous avait montré surtout la dépression morale et cérébrale résultant pour « l'intellectuel », de son passage à la caserne. - et l'auteur apparaissait trop, lui-même, le soldat molesté, raisonnant, nous exaltant, se soulageant en éloquentes phrases de révolte, du silence où s'exaspéra sa nervosité trop fine, - de telle manière que nous n'avions point là une oeuvre d'entière sincérité, où l'on sentait quelque égoïsme inconscient d'homme indigne de tomber sous la loi commune. Il est à remarquer que l'éclosion du roman militaire date du service « pour tous » semblait surtout la déterminante des révélations d'alors, les oeuvres devenant une nécessité de réagir pas encore assez volontaire, comme un réflexe.
Certes, le document était passionnant, mais, nous le disons, il lui manquait le caractère d'universalité. M. Albert Lantoine, vient, à mon sens, de le lui donner.
Ce n'est plus lui, impeccable et minutieux observateur taisant sa propre impression, qui est en cause, ce n'est pas une classe spéciale d'homme que l'on peut dire moins endurants à la souffrance. - et prompts à la sentir, à l'exagérer, à se la suggérer même : c'est un homme du plus Grand-nombre, un villageois, un fruste, un humble, un passif, - une épaisse santé. C'est la plus grande partie de l'armée, au moment où les hommes gagnent la Caserne.
Lagrue, 1168, - c'est l'un d'eux : c'est cet homme des champs qui arrive là sans comprendre, ne cherchera pas à comprendre, s'évertuera seulement à toutes les minuties qu'on exigera de lui sans se demander en quoi elles peuvent répondre à l'idée de Patrie, - certes sans un geste de révolte, halluciné du mot : la mort ! Éclatant terriblement à toutes les pages de la « Théorie » où lui sont édictés ses devoirs... Et, pourtant, c'est ainsi, à la dernière page du livre, que sera exprimée sa sortie de l'armée, - « la grande Famille » :
« ... Et comme le maréchal-des-logis de semaine Delbray appelait par inadvertance, son carnet à la main :
Lagrue !
Rouillot (l'adjudant) tourna la tête – rigoleur : - Crevé !... »
Crevé ! oraison funèbre de Lagrue à qui deux ans d'incompréhension de son supplice quotidien, avaient fait apparaître doux et nécessaire, le suicide ! Il était mort pour une aiguille !...
C'était l'inspection du général :
- Combien devez-vous avoir d'aiguilles ?
- Six, dit Lagrue, - péniblement.
Six aiguilles, c'est cela ! Eh bien, cet homme n'en a que cinq dans son étui !...
Et tel l'état de dépression physique, - tel l'état d'épuisement cérébral où lentement était venue cette saine et douce et passive brute que nous avons vue arriver au corps, que cette aiguille manquante est assez pour déterminer la démence obscurément latente, pour le précipiter vers la seule issue, la mort ! L'obsédant vocable inscrit si souvent en tête de sa « théorie » avait eu raison, quand même...

Ah ! Vous, que ne fait plus rire l'évocation de ce général aux victoires promis et dès maintenant si hautement préoccupé de la défense nationale, et des revanches futures, - quelle terrible maison est donc la Caserne, pour ainsi détruire même le corps et les âmes de santé animale !... Il apparaît de beaucoup plus atroce le supplice d'un Lagrue, que d'un « intellectuel » ; car, au moins, celui-ci raisonne sa misère, doit savoir de son intelligence et de sa vertu morale réagir en lui-même, arriver au mépris qui est une force, - au sourire, et à une sorte d'intérêt qui soulage, à suivre l'oeuvre imaginative de l'Imbécilité ! Mais l'humble, à ses champs arraché, toute sa misère aggravée de ce supplice à nul autre pareil : ne pas comprendre !
Lagrue, c'est le drame, oh ! Sans violences, d'une lenteur ténue plus exacerbante que toute appréhension de catastrophe, plus secoueuse que tous délires passionnels. Mais autour de lui, et à vérité et à intérêts égaux, toute la Caserne vit son activité vide. Du haut en bas tout s'agite en un néant empressé, les minutes comptées. Et c'est aussi par là que le livre de M. Albert Lantoine est d'une nouveauté surprenante et difficile: noter à traits caractéristiques ce désoeuvrement surmené, fébrile, - cocasse, important, méchant ! Oh ! Cette méchanceté d'animaux tendus en sournoiserie : des chefs entre eux, des soldats entre eux : car, - la solidarité de misère que l'on croirait peut être exister, est cruellement absente. Une seule loi : celle de la force brutale et tracassière, - et Lagrue meurt autant de ses camarades que de ses chefs. C'est la « grande famille »...
Mais, voraces, rouges, hurlantes, d'instincts de brutes échappées dans l'abolition de tout respect et des autres et de soi, - deux grandes scènes de nuit domine le livre, puissantes. La fête de la Sainte Barbe (nous sommes dans un régiment d'artillerie de forteresse, au Nord), et la Fête du 14 Juillet. C'est le débordement dans l'ivresse et la débauche sanglante, quelque cauchemar énorme où se brassent les chairs à plaisir sale qu'on tape au ventre, à coups de botte, enfin... Je n'insiste pas, ni sur les stigmates inguéris qui pourriront demain la race des villages. Cela s'appelle servir la Patrie...
Et, ce livre est généralement gai. Il narre en douceur de telles inepties, de telles déchéances simiesques qu'on ne peut retenir le rire, - l'instant d'après figé en rictus !

René Ghil

La Critique, N° 93, 5 janvier 1899.


(1) Ici René Ghil anticipe les reproches d'opportunisme qui auraient pu accompagner la publication, durant l'affaire Dreyfus, de La Caserne.

(2) Voir Livrenblog : Ma présentation de Les Mascouillat et Albert Lantoine l’homme, par Sébastien-Charles Lecomte.

(3) Si deux de ces livres sont des romans très critiques sur la vie militaire - Lucien Descaves : Sous-offs (1889), et Abel Hermant : Le Cavalier Miserey (1887) - et peuvent être comparés avec La Caserne. Sous le sabre (1898) recueil d'articles de combats sur l'affaire Dreyfus par Jean Ajalbert n'a lui, rien de romanesque.

René Ghil sur Livrenblog : René Ghil. "Chair mystique" et "Titane". Charles-Louis Philippe par René Ghil. Réponse de Ghil à l'enquête sur la poésie et les poètes de la revue Le Beffroi. Extrait de lettres de Ghil à Albert Lantoine.



Gaston Chérau Le Monstre




Gaston Chérau
Le Monstre


Qui est le monstre ? Le père Massé, le maître du Chebroux, consommateur de filles de ferme, amateur de chair fraîche qui s'octroie le droit de cuissage sur toutes les « nouvelles », pauvres servantes renvoyées sitôt engrossées ? Mame Massé, « la Bourgeoise », qui laisse faire son mari, mais veille au grain et se charge du renvoi des filles avant qu'elle ne soient grosses ? Leur fille, Hortense, enceinte des oeuvres de son père, ravalée au rang de servante, qui aidée par sa mère, conseillée par Gentil, le rebouteux, tente de se « délivrer » en s'épuisant aux travaux des champs ? Le curé qui menace de la damnation éternelle, la mère venue lui demander conseil ? Les frères, complices apeurés de leur mère ? La ferme et le village entier, effrayé, fuyant Hortense et son fils comme des bêtes malade ? Non le monstre, pour tous, c'est « l'Fi » qui est venu, venu malgré tout, ce fils qui est le fils de son grand-père, le frère de ses oncles. Ce « Fi » devant qui les femmes se signent, les hommes se taisent et dont les petits parlent « avec un tremblement dans la voix ».

Le Monstre est une tragédie se déroulant dans le Berry du début du siècle, la nouvelle paraît pour la première fois en 1907 dans le Mercure de France. Ses protagonistes ne sont que des « Pésans », durs au mal, brutaux, Chérau nous décrit leurs réactions face à un fait inconcevable, « une chose si nouvelle ». Il nous conte le destin tragique de deux être rejetés par leur milieux, leur famille. Un milieux fermé, où les secrets sont chuchotés au curé ou au rebouteux, un famille où l'on ne parle pas, où le travail et la réputation ont plus d'importance que la vie même, où seule la peur de la punition divine empêche le meurtre.

Face à l'abjection Chérau ne juge pas, il ne se fait pas moralisateur, il décrit, donne à voir le point de vue de chacun, il n'intervient pas et c'est ce qui fait la force de cette nouvelle, ce qui fait qu'elle bouleverse et ne peut laisser indifférent.
La force de cette nouvelle, l'émotion et les questionnements qu'elle suscite, ne peut que nous inciter à aller voir de plus près dans la bibliographie de son auteur donnée en fin de volume.

Gaston Chérau : Le Monstre. Préface de Sylvaine Viel-Notte. 80 pages, Format : 13 x 19 cm Prix : 11,00 €

Versant Libre.
7, rue du Stade
36400 La Berthenoux

Gaston Chérau dans l'Alamblog.


mercredi 26 août 2009

ZOLA intime par Henry CÉARD


Zola par Céard




Henry Céard (1851-1924), fonctionnaire et écrivain naturaliste, est l'auteur de la nouvelle, La Saignée, dans les Soirées de Médan, fasciné par la stérilité de la création, pessimiste, il laisse deux romans. Du premier, Une Belle journée, il veut faire le roman sur rien, son récit d'un adultère bourgeois est vidé de son contenu narratif, sans événements, sans péripéties. Son personnage féminin, Ernestine Duhamain est confronté à « la médiocrité de l'existence comparée à la splendeur des illusions» (1) comme l'Emma Bovary de Flaubert. Dans le second, son chef-d'oeuvre, Terrains à vendre au bord de la mer, il tente la réécriture du mythe de Tristan et Ysolde en utilisant le leitmotive wagnérien. Dans ce roman foisonnent les personnages, à partir d'une intrigue principale viennent se greffer de nombreuses intrigues secondaires. Si le premier roman est un livre sur rien, le second se veut un roman total. Céard est l'auteur de quelques pièces de théâtre qui ne lui apporteront pas le succès. Son amitié avec Emile Zola ne résistera pas à l'affaire Dreyfus. C'est dans la Revue Illustrée, volume 3, n° 29, du 15 février 1887, que paraît ce Zola intîme.



Zola intime


C'est un pays à la fois très parisien et très littéraire que ce village de Médan où M. Émile Zola a fixé sa résidence. Ni trop près, ni trop loin du monde, ainsi que le prescrivaient les hygiénistes cérébraux du dix-huitième siècle, Medan, à distance égale de Poissy et de Triel, est une ancienne seigneurie qui, du neuvième siècle au siècle actuel, fut toujours possédée par des Parisiens. Au quinzième siècle, Henry Perdrier, changeur et bourgeois de Paris, restaura le château et donna à l'église l'aspect qu'on lui voit encore. Au seizième, un autre Parisien, Jean Brinon, conseiller du roi en son Parlement, et ami de Ronsard, lequel lui a dédié plusieurs pièces de vers, Jean Brinon y amena la littérature et dans les histoires, où le littéraire magistrat festoya des écrivains qui lui rendirent sa politesse « en sonnets, odes et épigrammes grecs, latin et français. Et raconte Belon dans son Traité de la Nature des Oiseaux, ayant consacré les fontaines, Dorat, l'un de la compagnie, voyant que la nymphe de Médan convertit ses larmes en pierre, et voulant en perpétuer la mémoire, imprima tels mots sur un tableau. Or, pour achever le reste de l'exploit, estant vêtus des livrées de leur conducteur, ayant fait voile pour passer outre, arrêtèrent peu qu'ils ne se trouvassent au rivage des îles. » De ces îles, qui font face à Médan, une partie appartient à M. Émile Zola, et, quelque jour, il y installera peut-être le buste de Jean Brinon, en son temps si hospitalier aux littérateurs, qu'il mourut pauvre des dépenses faites pour les libéralement protéger.


Au milieu de ces souvenirs d'art heureux et d'accueillante littérature, M. Émile Zola a posé la maison modeste d'abord, puis, chaque année, augmentée avec le succès, où s 'écrit le meilleur de son oeuvre, où se révèle un individu qu'en dépit de dix ans de notoriété, Paris ne connaît pas. Car il y a plusieurs Zola. De même que ses portraits photographiques, exécutés à différentes époques, le représentent avec une physionomie d'une déconcertante variabilité, de même, il y a chez lui plusieurs types sociaux. On connaît le Zola bastionné, le Zola armé en guerre des polémiques et des journaux ; on connaît le Zola défensif et réservé des premières représentations des salons et des dîners publics ; mais ce que tout le monde ignore, c'est le Zola chez lui, le Zola retiré des batailles théoriques, le Zola libre des conventionnelles entraves de la société, le Zola laissant volontiers vagabonder sa parole, rire sa fantaisie et s'épancher son coeur. Il a pu dire de lui qu'il ne savait point être éloquent, on a pu imprimer qu'il manquait d'esprit. Demandez à Goncourt, demandez à Daudet, demandez à tous ceux qui l'ont vu à Médan : ceux-là vous apprendront combien les appréciations de Paris sur Zola deviennent fausses loin des hypocrisies galantes, loin des tables de café, des bureaux de rédaction, au milieux du laisser-aller des amitiés et de l'indépendance de la campagne. Oui, certes, il est éloquent quand il raconte sans amertume les noires journées de sa jeunesse pleine de misère et d'espérance ; il est spirituel quand il raconte ces événements de 1870 dont il a vu à Marseille et à Bordeaux la navrante tragi-comédie ; éloquent et spirituel quand il juge les faits et apprécie les hommes, avec une bonhomie à la fois insinuante et bourrue qui fait songer au comique cruel et pincés de certains personnages de Molière, à la gouaillerie machiavélique et souriante du père Grandet, dans Balzac. Beaucoup, dans la presse, aux heures des vives discussions et des dures ripostes, ont ressenti les atteintes de ce bon sens, tout ensemble acéré et contondant, de cette ironie à la cuisante indulgence, et c'est merveille que la critique ne les ait jamais signalés, car ils éclatent encore et se montrent en maintes pages des livres du romancier. Que de fois il leur a donné corps dans les personnages de ses romans, et parmi ces personnages, combien d'entre eux, dont la nomenclature serait à la fois trop longue et trop facile, ne sont qu'une représentation méconnue de son individu intime et la pseudonyme mise en scène de son être moral.


Je ne parle pas de Sandoz, dans l'Oeuvre, la découverte étant d'une commodité humiliante, mais Claude, dans la Confession de Claude, mais Mouret, le bourgeois de la Conquête de Plassans, et dix, vingt autres encore. Malheureusement, elle dépasserait le papier mesuré à cette étude, cette anatomie-là qui, article par article, roman par roman, nouvelle par nouvelle, à travers les théories et les systèmes, les imaginations et les paragraphes, montrerait en quels endroits précis l'écrivain a laissé parler l'homme et sous quels masques transparents il s'est souvent confessé. Par là on ferait voir aisément ce qu'il y a parfois de faiblesse secrète chez ce résistant, d'inédite mélancolie chez ce combattant d'apparence inébranlable, d'inavouée contradiction chez ce théoricien à la philosophie si mathématique et à la logique si implacablement déduite.

Solitaire, enragé presque de solitude, l'examen patient de ses livres nous le montre heureux de voir « le monde finir à la porte de son jardin ». Plus loin on l'entend s'affliger doucement du manque de cohésion amicale de la littérature actuelle, et, dans son étude sur George Sand, regretter la fraternité batailleuse des écrivains du romantisme naissant. Contemplatif, dans une fin d'article, il demandera « à la grande nature de le prendre et de le garder» ; en même temps, dans son antinomique Joie de vivre, par la bouche de son Lazare, répétant Schopenhauer et Hartmann, il jettera sur les incessantes douleurs du monde un cri de suprême désolation, et proclamera avec souffrances et larmes l'irréfutable aveu de l'inutilité de tout. Oui, mais on le trouve aussi, agissant et parlant avec les dominateurs de sociétés et les dompteurs de circonstances. C'est lui, lui toujours, c'est sa volonté de vaincre le néant, c'est sa croyance en la force, son credo « dans la puissance de la vie » qu'on retrouve en ces Saccard, ces Rougon, ces Mouret, c'est Faujas, qui partout où ils entrent, finance, politique, magasin ou sacristie, apportent un opposés que, dans l'intimité, aux jours des grands deuils, sortiront pour ses amis, ces lettres d'une élévation si sceptiquement religieuse, d'une consolation si bravement humaine, où il dira avec un accent tout ensemble vaillant et désabusé « que dans la parfaite inutilité de tout, c'est encore le travail qui donne le plus d'illusion et le moins de néant. »


Le travail ! Consultez les catalogues, ils vous feront constater avec une persuasive et précise éloquence avec quelle continuité M. Zola le pratique. Encore les catalogues sont-ils naturellement incomplets, et malgré l'accumulation des volumes imprimés, ne donnent-ils qu'un renseignement bien approximatif sur la quantité d'écriture où se dépensa jadis M. Emile Zola. Collaborations au Progrès de Lyon, au Corsaire, à la Cloche, au Figaro, au Gaulois, à la Vie parisienne, à la Tribune, au Sémaphore de Marseille, à la Constitution, à l'Avenir national, au Rappel même, ont peut évaluer à cinquante ou soixante volumes la copie qu'il a dédaigné de recueillir. L'intempérance du reportage a tant de fois fait connaître de quelle façon le romancier travaille, avec quelle méthode, dans quel appartement, en quel costume et par combien de degrés centigrades, que l'originalité aujourd'hui consiste peut-être à dire comment M. Zola se repose.


La tâche faîte et le déjeuner terminé, l'après-midi, le voilà debout surveillant les ouvriers de ses toujours recommençantes bâtisses, achevant une construction uniquement pour le plaisir de songer à en édifier une autre, promenant quotidiennement au milieu du tapage des scies et des marteaux, au milieu des retentissantes chansons des peintres sur leurs échelles, la silhouette d'un architecte campagnard. Les plans qu'il fait exécuter, il les a élaborés lui-même. C'est son plaisir particulier et sa débauche la plus exquise que ce remuement de moellons et cette adjonction continue de pavillons à l'étroite maison où se bornaient jadis ses premiers rêves de propriétaire. En cela il cède manifestement à quelque entraînement héréditaire ; sans doute il subit l'influence physiologique de son père, constructeur de canaux et grands ouvriers de projets dans les ponts et chaussées, et peut-être, plus qu'il ne le suppose, contrôle-t-il lui-même les théories du docteur Lucas et le système sur lequel il a bâti toute la série des Mougon-Macquart, quand interrogé sur son goût des matériaux et des échafaudages, il répond qu'il « aime beaucoup à faire l'ingénieur ».


Le gros oeuvre achevé, la décoration intérieure le préoccupe ensuite, et c'est alors une grande recherche de tentures, de boiseries et de bibelots dans le choix desquels se révèle son goût du majestueux, du confortable et du décoratif. Le romantisme, dont il a avoué lui-même n'avoir jamais entièrement débarrassé ses goûts, ses conceptions et parfois son style, le romantisme combattu dans les lettres, par son retour offensif, dans tout l'ameublement reparaît en vainqueur.
Par le clair soleil traversant les vitraux héraldiques, les meubles Louis XVI et les bouddhas indiens, les hommes d'armes moyen âge et les kakmonos japonais, les cabinets vénitiens incrustés d'ivoire et les sièges aux chatoyantes soies modernes, mêlent sous l'immensité des plafonds peints leurs formes, leurs couleurs, leurs étrangetés comme dans le Paradou de la Faute de l'Abbé Mouret ; les fleurs de tous pays de toutes saisons, écloses en même temps, confondent leurs nuances, leurs parfums et leurs paradoxales structures. Les instruments même concourent à la décoration. Voici un gong du Japon, un chapeau chinois de garde nationale, des mandolines, un piano, un orgue même. En effet, si les représentations d'opéra trouvent dans Zola un auditeur à chaque instant blessé au plus sensible de sa logique, la musique en elle-même, la musique par sa lucide complication et sa savante architecture, l'intéresse et l'attire. Dans la construction des symphonies telles que les écrivent les grands maîtres, il sent une indéfinissable et étroite correspondance avec ses procédés littéraires ; dans ses livres, le retour obstiné d'épithètes spéciales caractéristiques du sujet, la réapparition de bouts de phrases volontairement toujours les mêmes, affectent une incontestable similitude avec le leit motiv familier aux partitions de Richard Wagner, de Wagner qu'il soutenait jadis de ses applaudissements lors des premiers sifflets et des premières batailles, et qui le séduit aujourd'hui encore, dans sa retraite, par la magistrale ampleur de ses développements harmoniques, même écourtés sur l'orgue, même étriqués par l'inévitable sécheresse d'une exécution au piano. Les opinions de Gagnère dans l'Oeuvre indiquent nettement à quelles tendances M. Émile Zola obéit en musique et témoignent, sinon de son étude approfondie des ressources de cet art spécial, au moins du parti supérieur qu'il sait tirer des conversations et de quelle façon personnelle il s'assimile les nouveautés ambiantes.
Car, ce silencieux, à Paris, à Médan, est un grand, un inépuisable causeur. Laissez-le réveiller sur ce divan où la Revue Illustrée le montre abandonné dans le sommeil et faisant, à poings fermés, sa sieste d'homme du Midi. Là, étendu pendant des demi-journées entières, invitant ses interlocuteurs à s'étendre à leur tour, compensant la paresse du corps par l'activité de l'esprit, ce sont des conversations qui touchent à tout, et d'où, avec une sagacité toute particulière, il tire toujours un profit, toujours un renseignement. Personne moins que lui ne parle pour parler. Il excelle à tirer de ceux qui l'entourent la notion des choses qu'il ignore, la confirmation de ses hypothèses, la quintessence des questions qu'ils ont longtemps étudiées et qu'ils connaissent par le détail. Et quand le sujet dévie, quand les éclaircissement s'embrouillent, avec quel à-propos il rattache le fil rompu des raisonnements et des faits, avec quelle justesse il ramène les conséquences à leur logique. Il a un « mon ami, qu'est-ce que vous me racontez-là ! » qui impose aux paradoxes et ne laisse plus de détours aux subtilités. Avec cela très persuasif. N'abandonnant jamais rien au hasard, pas plus sa parole que sa plume, par un mouvement qui lui est familier, les doigts de la main droite appuyés sur l'intérieur de sa main gauche ouverte, méthodiquement, presque matériellement il dispose son argumentation et en suit toutes les parties comme un joueur suit la marche des pièces sur un jeu d'échecs. Avec une progression continue, avec une délicatesse de style et une singulière diplomatie d'expressions, il ouvre à ses idées les esprits les plus récalcitrants et les plus mal disposés. Il ne les entraîne pas toujours, mais à tout le moins il les inquiète, les trouble, ralentit les décisions rapides qu'ils allaient prendre, et les pousse malgré eux à plus de réflexion. Lui-même est long à se rendre aux idées étrangères. Il accepte avec impatience d'abord les manières de voir opposées aux siennes ; mais qu'une démonstration logique se fasse entendre, le voilà résistant encore, mais conquis. Aujourd'hui, par manière de retraite honorable, il continuera à se défendre et à lutter, demain vous le trouverez acquiesçant et désormais convaincu.
Et tendre ! La badauderie peut prendre l'affirmation pour un défi, l'exacte vérité pour un paradoxe. Oui, chez cet écrivain dont la phrase n'a jamais reculé devant la plus rude réalité, chez ce polémiste écrasant ses adversaires comme un bélier tombant sur un piquet, il y a un coeur tendre. Vous l'avez éprouvé comme moi, mon cher Huysmans, en ce jour où, avant de la publier, il nous lut, à nous deux, son étude sur Gustave Flaubert. Il voulait voir quel effet elle produirait sur nous, désolé qu'il eût été, si en même temps que la vérité stricte, quelque chose avait pu passer dans ses phrases qui fût capable de compromettre devant les lettres la mémoire de son grand maître et ami. Nous approchons des fauteuils. Il prend dans le tiroir d'un meuble hollandais un manuscrit qui n'est pas de son écriture. « C'est ma mère qui a copié », dit-il ; « elle adore écrire ; seulement quelque fois elle met des mots les uns pour les autres, ça ne va peut-être pas être très commode. Si encore la Russie m'avait renvoyé ma copie. Enfin, nous allons toujours voir. »
La première partie est pleine du récit des funérailles. Il fait d'abord d'une façon lourde, lente, calme. Et puis, à mesure que les détails se précisent, sa parole s'entrecoupe. A l'arrivée à Rouen, elle tremble. Elle ânonne sur le chemin de Croisset. Voici le corbillard qui monte la rampe de Canteleu, et sur la phrase où il rend compte de cette poignante impression éprouvée par tous les gens venus de Paris, devant le cercueil de Flaubert, il éclate en sanglots et se laisse pleurer silencieusement. Puis me tendant le manuscrit :
- Tenez, pouvez-vous lire ?
Je continue. Et pendant que je lis, il demeure la main sur ses yeux, dissimulant ses larmes, tout à une douleur qui le secoue dans sa littérature, dans sa tendresse d'ami, dans sa personne de méridional répulsif à la mort et épouvanté du néant.
- Merci, mettez ça ici.
C'est le domestique qui vient de monter, apportant de la tisane pour soigner la gravelle dont Zola s'est plaint le matin. La lecture continue. Flaubert y revit mot pour mot, page pour page, et à tout moment Zola répète : - N'est-ce pas, c'est bien là l'homme ? Puis il se lève, va chercher sa tasse, et boit, lentement, les yeux en larmes. Et pendant les cinquante-cinq pages du manuscrit, c'est ainsi un continuel va-et-vient de ses souvenirs à sa tisane, une scène inoubliable où se mélangent, dans une émotion et une bonhomie extraordinaires, son souci de rien dire qui puisse blesser les susceptibilités les plus délicates à l'endroit de Flaubert, et de sa mémoire, et la machinale occupation de diminuer le mal atroce que lui cause le mauvais état passager de sa santé.
Et si cette page, détachée de nos souvenirs personnels, à Huysmans et à moi, ne suffisait pas à la démonstration, qu'on veuille bien relire, au dernier chapitre de l'Oeuvre, la description des tombes d'enfants dans le cimetière de Saint-Ouen, un morceau d'une délicatesse de sentiment qui suffirait à la fortune d'un romancier idéaliste ; qu'on se rappelle, dans le Voltaire, la note annonçant la mort de Duranty, et qu'on rapproche dans la collection du Figaro la paternelle oraison funèbre qu'il fit à Louis Desprès ; qu'on la rapproche du féroce persiflage de l'article où, lors de ses démêlés avec la censure, il raconta ses visites au ministère, et quelles étranges conversations il eut l'étonnement d'y entendre.
Là, dans le plein jour de l'imprimé, avec ses éloquences, ses ironies et sa tendresse, on rencontre M. Émile Zola, tel que Médan le cache au milieu de la verdure de ses ombrages et de l'antiquité de son histoire. C'est ce Zola que j'ai accepté de montrer, c'est ce Zola que j'ai essayé de faire connaître. Quelques feuillets de notes rapidement rédigées détruiront-ils la fausse figure que la légende, avec un grand crépuscule d'inexactitude, a donnée du romancier ? Cette illusion ne me travaille point. Je souhaite seulement qu'au moment où le public me reprochera d'avoir blessé ses longs préjugés à l'endroit du littérateur, l'homme ne m'accuse pas d'avoir manqué de discrétion en parlant si démesurément de particularités intimes, lesquelles, suivant ses propres paroles, « sont étrangères à sa bataille d'écrivain. »


Henry Céard.




Illustrations : dessins de La Barre, gravures de Florian, Froment et Ch. Baude.


Émile Zola sur Livrenblog : Zola mis en fiches. Edouard Toulouse. La Vérification des bagages Emile Zola illustré par Fernand Fau. Emile Zola dans le Reporter de Paul Brulat. L'Assommoir d'Emile Zola, étude critique, par Frederic Erbs.

Lire :

Henry Céard :
- Une Belle journée, suivi de A la mer et de Trois poèmes. Edition de René-Pierre Colin, Du Lérot éditeur, Collection "d'après nature".
- Terrains à vendre au bord de la mer. Mémoire du livre, 2000. Préface de Georges Londeix. Postface de Colette Becker.

Sur la réception des oeuvres de Zola : Émile Zola. Mémoire de la critique. Presses de l'Université de Paris-Sorbonne, 1998. Textes choisis et présentés par Sylvie Thorel-Cailleteau.



mardi 25 août 2009

Renée DUNAN : Au temps de l’Œil Cacodylate.






Le blog de Fabrice Lefaix Au temps de l’Œil Cacodylate, rend compte des recherches de son auteur sur Francis Picabia et le mouvement Dada parisien, il offre un "Panorama bio-icono-bibliographique des soixante signataires" de l'oeuvre de Francis Picabia du même nom (1).



A l'occasion d'un billet consacré à un article de Renée Dunan sur Dada publié dans la revue anversoise Ça Ira ! Fabrice Lefaix a la gentillesse de citer l'un de nos premiers billets : Nouvelles du Caire 1920 Renée Dunan Dadaiste. Qu'il en soit remercié.


Profitons-en pour nous promener dans Au temps de l’Œil Cacodylate, blog d'une grande richesse, on y trouvera des documents inédits, photos, interviews, documents... La preuve qu'un blog, ou un site, fait avec passion et érudition peuvent s'imposer comme indispensables pour la recherche autour d'écrivains ou de mouvements littéraires.


(1) L'Oeil Cacodylate (1921) est une huile sur toile avec collage de photographies, cartes postales et papiers découpés, Picabia fait signer celle-ci par soixante de ses amis.



dimanche 23 août 2009

L'Incohérence, les illustrations sans le texte.





Le 16 avril 1887, Jules Lévy, organisateur des expositions des Arts incohérents (1) depuis 1882, décide « d'enterrer » l'Incohérence par une soirée costumée et un cortège funèbre. La Revue Illustrée du 15 mars 1887 (volume 3, n° 31) paraît avec en couverture un texte intitulé L'Incohérent, accompagné d'une illustration, de Jan Van Beers (ci-dessus). Dans la revue un texte, L'Incohérence, signé d'Emile Goudeau, fait l'historique de cette aventure que furent les expositions des Arts incohérents. Ces textes sont repris dans la parfaite édition de Dix ans de Bohème de Goudeau, publiée par Michel Golfier et Jean-Didier Wagneur avec la collaboration de Patrick Ramseyer aux éditions Champ Vallon en 2000 (pp. 451 à 457) (2). Le texte dans la revue est illustré de dessins de Ferdinandus, Emile Cohl, A. Badufle, Alfred Le Petit, L. Mesplès, Habert, Albert Bertrand, E. Grivaz... Ce sont ces dessins que je reproduis ici.

(1) Voir le magnifique site consacré aux Arts incohérents.
(2) Texte en partie disponible sur la toile : Emile Goudeau. Dix ans de Bohème suivi de Les Hirsutes de Léo Trézenick. Champ Vallon, 2000.


















Emile Goudeau sur Livrenblog : Adieu à Charles Cros par Emile Goudeau. Les Fous et Emile Goudeau par Jules Bois. Émile Goudeau : Fleurs du bitume (1885).

samedi 22 août 2009

Maurice MAETERLINCK en images


Maurice Maeterlinck, Les Hommes du Jour, N° 133, 7 août 1910




Envoi de Maurice Maeterlinck à Henri Gauthier-Villars (Willy) sur Monna Vanna, Librairie Charpentier et Fasquelle, 1902




Alladine et Palomides, Interieur et La Mort de Tintagiles : Trois petits drames pour marionnettes, Edmond Deman, Collection du Réveil, Bruxelles, 1894, culs de lampe hors texte de Georges Minne


Les Sept Princesses, Paul Lacomblez, 1891. Les Aveugles (L'Intruse. Les Aveugles), Paul Lacomblez, 1892. Aglavaine et Sélysette, Société du Mercure de France, 1896. La Princesse Maleine, Paul Lacomblez, 1890. Joyzelle, Librairie Charpentier et Fasquelle, 1903. Serres Chaudes suivie de Quinze chansons, Paul Lacomblez, 1906.

L'édition originale des Aveugles est de 1891 celle de L'Intruse est de 1890, elles forment avec Les Sept Princesses ce que Maeterlinck appelle lui-même « une petite trilogie de la mort ». Serres chaudes est le premier recueil de poèmes de Maeterlinck publié en 1889, les Quinze Chansons paraissent en 1896. C'est à la suite de la première publication de La Princesse Maleine en 1889 (l'exemplaire ci-dessus est daté de 1890 et porte une mention de 3e édition), que paraît, dans le Figaro, l'article d'Octave Mirbeau qui fera la gloire de Maeterlinck. Aglavaine et Sélysette, sera mis en scène par Lugné Poe, en 1896. Joyzelle, représentée pour la première fois au théâtre du Gymnase le 20 mai 1903, doit beaucoup à La Tempête de Shakespeare. Le rôle de Joyzelle était tenu par Georgette Leblanc (la compagne de Maeterlinck), celui de Merlin par Jean Kemm.

L'article qui suit le portrait de Maeterlinck dans les Hommes du Jour est de Han Ryner.



jeudi 20 août 2009

Le Père Ubu dans La Critique


Articles et iconographie autour du Père Ubu, parus dans La Critique et l'Omnibus de Corinthe.


- Tu préviendras ma femme si je viens à claquer ici !
- Quoi, monsieur, ça sera à ce point là ?

L'Omnibus de Corinthe, voyage 5, 1897 : L'Amour à mort par E. Couturier


A l'occasion d'un article sur Ubu enchaîné d'Alfred Jarry, Martine, dans La Critique, numéro 122 du 20 mars 1900, revient sur les divers articles et dessins publiés sur Jarry et le Père Ubu dans cette revue. Pour mémoire j'en donne la liste ainsi que les liens vers les billets de Livrenblog les reproduisant.

Articles publiés dans La Critique.
N° 37, 5 septembre 1896 – Ubu Roi, par Martine.
N° 44, 20 décembre 1896 – Ubu Roi, par Alfred Jarry – Ubu Roi, par Criticus
N° 70, 20 janvier 1898 – Ubu Roi, par Martine.
N° 94, 20 janvier 1899 – L'Almanach du Père Ubu, par Martine.

Dessins publiés dans La Critique :
N° 44, 20 décembre 1896 - Ubu Roi, lithographie, par Alfred Jarry
N° 68, 20 décembre 1897 - L'Omnibus de Corinthe, édition de luxe : Père Ubu, par Couturier.
N° 70, 20 janvier 1898 – Ubu Roi, 2e lithographie par Alfred Jarry.
N° 74, 20 mars 1898 – L'Omnibus de Corinthe, édition de luxe : Ubu et Ernest La Jeunesse par Couturier. Ubu à Madagascar, par André Ibels. (Omnibus de Corinthe, Voyage 6, 15 janvier 1898)
N° 94, 20 janvier 1899 – Les Coulisses du Père Ubu, par Couturier.

Alfred Jarry dans Livrenblog : Alfred Jarry : Premières publications. Messaline : Jarry - Dumont - Casanova - Champsaur. Ubu Roi par Martine et Papyrus. Alfred Jarry et Le Théâtre des Pantins. L'Almanach du Père Ubu par Martine. "Vive la France !" Le Théâtre des Pantins censuré. Les Jours et les Nuits d'Alfred Jarry par Émile Straus. Le Père Ubu dans La Critique. Le Surmâle d'Alfred Jarry par Martine et Papyrus.

Anna de NOAILLES, anarchiste suivant l'Évangile



La comtesse Anna de Noailles, née princesse Bibesco Bassaraba de Brancovan, se voulait "socialiste, anarchiste peut-être", si l'on en croit l'entretient que publie Paul Acker en 1905, dans Petites Confessions.
La Comtesse Mathieu de Noailles


« Mais oui, je suis socialiste, anarchiste peut-être. Je crois au peuple et à la fraternité des peuples, j'ai foi dans la science qui mène à la justice et à la pitié, et j'ai l'espérance d'un avenir qui sera comme un éternel été. »

D'un vois brève, nette et chaude, Mme la comtesse de Noailles vient de jeter cette phrase avec toute la conviction d'une jeune apôtre révolutionnaire, et ma surprise est si profonde et soudaine que je ne trouve rien à répondre. [...] alors, étonnée de mon étonnement, celle qui publia, il y a deux ans, les vers à la fois émouvants et étranges du Coeur innombrable, et dont le premier roman, à peine paru, La Nouvelle Espérance, agite déjà le Tout-Paris mondain et littéraire, reprend avec tranquillité :

- Mais oui, je suis avec ceux qui veulent pour la masse de tous les hommes plus d'équité et plus de bonheur. Oh ! Je ne suis pas avec les ducs et les princes, oh non ! Voyez : n'approchons-nous pas, de plus en plus, de cet idéal, et n'y a-t-il pas, chaque jour, de nouvelles lois sociales qui répartissent mieux la justice et la liberté, et dont vous-même vous profitez ?

[...]

- Je ne crois pas qu'il y ait, aujourd'hui, plus de justice ou plus de liberté. Au contraire...

Vive, enthousiaste, obstinée à me convaincre, Mme de Noailles m'interrompt :

- Si, si. Tenez, ces malheureux Espagnols de la Mano Negra, depuis quinze jours, ils sont libres, et c'est aux socialistes qu'ils le doivent. N'est-ce pas admirable, ce résultat ? Vous ne pouvez pas le nier, et vous ne nierez pas non plus que la science seule nous permettra de réformer la société selon des règles certaines. N'est-ce pas elle qui nous apporte la vérité absolue et qui délivre la foule de l'erreur ?

[...]

- Alors, vous allez raconter tout ce que je vous ai dit sur moi ? Mai j'ai très peur maintenant, on va me blâmer d'avoir tant parlé.

Je répondis avec simplicité :

- Je dirais même que vous êtes anarchiste, et que vous rêvez la mort par la bombe de tous les aristocrates et de tous les bourgeois.
Elle me regarda, toute surprise, presque triste, et elle eut un geste charmant d'horreur et de pitié, comme pour éloigner de son esprit une cruelle vision :

- Oh non ! Fit-elle, pas de bombes, pas de bombes...

Et, souriant, elle ajouta :

- Je suis une anarchiste suivant l'Évangile.


Paul Acker : Petites Confessions (visites et portraits). Première série. Albert Fontemoing, éditeur, Collection Minerva. 1905.


mercredi 19 août 2009

Parmi les 400 billets de LIVRENBLOG





Quelques auteurs ou thèmes

à

retrouver sur Livrenblog

Paul ADAM :

Paul Adam par Francis Vielé-Griffin Paul Adam : Préface à L'Art Symboliste de Georges Vanor Ravachol de Paul Adam au Petit Journal. Les Incohérences et contradictions de M. Paul Adam, "Anarchiste"

BIBLIOGRAPHIES :

Revue L'Image, bibliographie complète et illustrée. Bibliographie de la revue Le Beffroi (1ère partie), (2e partie), (3e partie), (4e partie). Bibliographie illustrée et complète du journal Le Pierrot (1ère partie), (2e partie), (3e partie), (4e partie). Bibliographie de la collection des Célébrités Contemporaines aux éditions de la Nouvelle Revue Critique. Bibliographie de la collection Les Célébrités Contemporaines de la Bibliothèque international d’édition / Sansot. Les livres de souvenirs…. suite., Encore des livres de souvenirs, La revue Palladienne de 1 à 10. Les Contemporains A. Le Petit F. Champsaur.

Félicien CHAMPSAUR :

Les Contemporains A. Le Petit F. Champsaur. André Gill, Les Hommes d'Aujourd'hui. Messaline : Jarry - Dumont - Casanova - Champsaur. Félicien Champsaur : Poètes Décadenticulets. Nina de Villard par Félicien Champsaur

COLETTE :

Colette "En Camarades". Quelques poses plastiques. Colette : Lettres à Missy Colette, Willy, Missy Willy, Colette, Missy (bis) Polaire, actrice et chanteuse Willy Publicité littéraire. Willy, préface pour Solenière par Claudine. Colette Gauthier-Villars.

Romain COOLUS :

Romain Coolus et Jules Renard. Romain Coolus présente quelques amis. Les Etoiles crevées Prose légendaire par Romain Coolus

Fernand DIVOIRE :

Fernand Divoire, La Bibliographie. Fernand Divoire Deuxième partie . Art et stratégie, de Divoire à Turpin.

Renée DUNAN :

Nouvelles du Caire 1920 Renée Dunan Dadaiste. 200e Billet - Retour à Renée Dunan. Renée Dunan dans Tentatives. Renée Dunan. Lettre sur la bibliophilie.

ENQUÊTES :

Anatole France autopsié par Cendrars Divoire Morand Delteil... Enquête L'Ermitage 1893 Le Bien Social ? Une Enquête au Beffroi. La Critique. Une enquête sur le droit à la critique. 1896.

Opinions sur GAUGUIN :

Eugène Carrière - Jean Dolent - P. Durio - Fagus - Gustave Geffroy - Charles Guérin - Antoine de La Rochefoucauld - Camille Lemonnier - Maximilien Luce - A. Mithouard. G. Prunier. O. Redon Charles Morice Fin

Remy de GOURMONT :

Réponse à l'enquête de La Critique. Remy de Gourmont occultiste ? . Francis Poictevin par Félix Fénéon et Remy de Gourmont . Mécislas Golberg contre Remy de Gourmont : Orthodoxie Symboliste. . La Force des choses de Paul Margueritte par Remy de Gourmont et Jules Renard. Leurs Rêves : Remy de Gourmont, Rachilde. Scripsi : Gourmont. Nigond. W. C. Morrow. et les autres (Bulletin N°0) Scripsi n° 1 Bulletin du site des Amateurs de Remy de Gourmont Scripsi n° 2 Bulletin du site des Amateurs de Remy de Gourmont SCRIPSI N° 3 se présente Scripsi N° 4-5. Remy de Gourmont : Dialogues oubliés Etc...

André et H.-G. IBELS :

Une Ballade d'André Ibels. Ubu, Jarry, Bauer. H.-G. Ibels et La Revue Méridionale. Les « Ibels» Artistic’s et littéraires. Han Ryner et André Ibels.

Alfred JARRY :

Alfred Jarry : Premières publications. Messaline : Jarry - Dumont - Casanova - Champsaur. Ubu Roi par Martine et Papyrus. L'Almanach du Père Ubu par Martine "Vive la France !" Le Théâtre des Pantins censuré.

JOSSOT :

L'Omnibus de Corinthe. Jossot. André Ibels. Jossot guillotine "l'Oncle" Sarcey. Jossot a son site.

Gustave KAHN :

Auguste Vaillant. Gustave Kahn et l'anarchisme. Auguste Vaillant (suite). Gustave Kahn et l'anarchisme. Emile Henry. Gustave Kahn et l'anarchisme. Charles Henry Encyclopédiste. Gustave Kahn se souvient.

LA JEUNESSE :

Ernest La Jeunesse pastiché. Faut-il lire Ernest La Jeunesse ? Ernest La Jeunesse préface au Forçat honoraire, roman immoral. Ernest La Jeunesse : Le Roi Bombance de Marinetti. Ernest La Jeunesse célèbre Fanny Zaessinger. Ernest La Jeunesse par Léon Blum. Bibliographie. Ernest La Jeunesse - Oscar Wilde à Paris. Les "Tu m'as lu !" Ernest La Jeunesse dessinateur 1ère partie. Les "Tu m'as lu !" (suite) Ernest La Jeunesse dessinateur. Ernest La Jeunesse - La Foire aux croutes 1ère partie. Ernest La Jeunesse - La Foire aux croutes suite. L'Omnibus de Corinthe. Jossot. André Ibels.

Julien LECLERCQ :

La Physionomie de Julien Leclercq. 1892, le Théâtre d’Art, le Cantique des Cantiques de P. N. Roinard, par Julien Leclercq. Daniel fragments d'un roman de Julien Leclercq. Quand ils se battent : Willy et Julien Leclercq.

Jean LORRAIN :

Jean Lorrain : Consul [le singe des Folies-Bergère]. Jean Lorrain n'assassinera personne. Jean Lorrain EN 1931 L'Esprit Français enquête. Samain : Mendès. Lorrain. Jeanne Jacquemin. Les Académisables : Jean Lorrain. Donnay se souvient : Verlaine, Schwob, Lorrain, Allais. La Maison Philibert au Théâtre. De Lorrain à Fréhel.

Catulle MENDÈS :

La Brasserie : Léon Bloy par Catulle Mendès. Lucien JEAN - Catulle Mendès. Samain : Mendès. Lorrain. Jeanne Jacquemin. La Peur dans l'île. Catulle Mendès.

Charles-Louis PHILIPPE :

Charles-Louis Philippe par René Ghil. Charles-Louis Philippe. Lucien Jean sur Bubu-de-Montparnasse extrait de Parmi les hommes. Une lettre de Charles-Louis Philippe.

RACHILDE :

Rachilde et le vin de coca. Visite aérienne à Rachilde. Camille Lemonnier, Lautréamont, Rachilde. Leurs Rêves : Remy de Gourmont, Rachilde. Jean de Tinan : La Princesse des Ténèbres par Jean de Chilra / Rachilde.

Jules RENARD :

Portrait par Pierre Veber, Sous-Bois, Les Lutteurs. Les Veber's. Félix Vallotton - Jules Renard. La Maîtresse. Histoires Naturelles, Bucoliques de Jules Renard par Léon Blum. François Coppée essentiel par Jules Renard. Les chroniques de Jules Renard, reprisent sur Livrenblog : Vamireh, roman des temps préhistoriques par J. H. Rosny Baisers d’ennemis par Hugues Rebell La Force des choses par Paul Margueritte Les Emmurés, roman par Lucien Descaves Bonne Dame d'Edouard Estaunié Les Veber's L'Astre Noir par Léon–A. Daudet Le Roman en France pendant le XIXe siècle par Eugène Gilbert (Plon).

Léon RIOTOR :

Les Phalanstériens de Montmartre. Léon Riotor. Léon Riotor par Fernand Clerget et Louis Lumet

Paul-Napoléon ROINARD :

Albert Cozanet - Jean d'Udine. Les Rythmes et les couleurs. Les Miroirs Paul-Napoléon Roinard, Chercheur d'Impossible (1ère partie), (2e Partie), (3e Partie).

J.-H. ROSNY :

J.-H. Rosny Revue Otrante. Vamireh, roman des temps préhistoriques de J. H. Rosny par Jules Renard. Biribi de Georges Darien par G. Albert Aurier et Rosny. Léon Bloy « catholique à la grosse tête » par J.-H. Rosny, "Catholique à la grosse tête" suite. A. France : Rosny/Myron vu par Rosny/Servaise. Des Pommes, des poires ? Alphonse Daudet psychologue. Rosny (J.-H.) : Les Ames perdues : Anarchie Fin de siècle. Willy, Tinan, Rosny

Laurent TAILHADE :

Laurent Tailhade par Alcide Guérin. Laurent Tailhade et La France. Préface de Laurent Tailhade aux Oeuvres poétiques complètes d'Edouard Dubus. Cynthia 3000 réédite Au pays du mufle de Laurent Tailhade. J. Rameau, Le "Claudicator" de Laurent Tailhade.

Revue Tendances Nouvelles :

Tendances Nouvelles : Frédéric Fiebig, Vassily Kandinsky. Valentine de Saint Point. Tendances Nouvelles. Merodack-Jeaneau par Hector Fleischmann.

Jean de TINAN :

Une photo de Mina Schrader, esthéte et anarchiste. Jean de Tinan, Willy, petite revue de presse. Jean de Tinan : La Princesse des Ténèbres par Jean de Chilra / Rachilde. Willy, Tinan, Rosny.

Jean d'UDINE :

Albert Cozanet - Jean d'Udine. Les Rythmes et les couleurs. Jean d'Udine : L'Art et le geste 1910. Jean d'Udine vu par Pierre de Lanux.

Les VEBER :

Les Veber's par Jules Renard. Les Veber Joviale Comédie. X... Roman impromptu (à dix mains). Coup de Filet par Les Veber's.

WILLY :

Cyprien Godebski / Willy. Controverse autour de Wagner. Les Académisables : Willy . Une photo de Mina Schrader, esthéte et anarchiste. Willy, Lemice-Terrieux et le Yoghi. Romain Coolus présente quelques amis. Colette, Willy, Missy - Willy, Colette, Missy (bis). Pourquoi j’achète les livres dont personne ne veut ?. Le Chapeau de Willy par Georges Lecomte. Nos Musiciens par Willy et Brunelleschi. Nos Musiciens (suite) par Willy et Brunelleschi. Willy l'Ouvreuse & Lamoureux. Quand ils se battent : Willy et Julien Leclercq. Willy préface pour Solenière par Claudine. La Peur dans l'île. Catulle Mendès. Léo Trézenik et son journal Lutèce. Willy Publicité littéraire. Coup de Filet par Les Veber's

Emile ZOLA :

Zola mis en fiches. Edouard Toulouse. La Vérification des bagages Emile Zola illustré par Fernand Fau. Belz de Villas : Contes Naturalistes [1882].